Le poids des mots…

16 Avr, 2021 | 0 commentaires

Deux évènements récents me donnent l’occasion de partager avec vous quelques réflexions relatives au bon usage et à la juste compréhension des maux mots de notre belle langue française.

Les plus anciens d’entre vous se souviennent certainement de la première devise du magazine Paris Match : « Le poids des mots, le choc des photos ».

Laissons les photos à Paris Match et voyons ce qu’il en est pour le poids des mots.  L’arrêt n° 39 (20-85.603) de la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 16 mars 2021 est un bon exemple. Je demande par avance aux juristes de pardonner mon emploi de quelques raccourcis, pour rester compréhensible au plus grand nombre.

Monsieur X… donne une suite favorable à l’aimable invitation de participer à une manifestation « marée jaune Lorraine », le 30 mars 2019 à Épinal. Cette participation, à l’insu de son plein gré, lui permet de se voir gratifié, avec toute la fermeté qui sied, d’une amende de 135 euros, sur le fondement de l’article L 211-4 du code de la sécurité intérieure, du fait que cette manifestation était interdite par arrêté préfectoral.

Notre « brave manifestant », sans doute juriste à ses heures, conteste cette sanction appliquée sur le fondement de l’article L 211-4 du code de la sécurité intérieure. En effet, celui-ci s’applique dans le cas d’une manifestation déclarée, ce qui n’était pas le cas dans cette occurrence.

Le juge rejette le pourvoi de Monsieur X… de façon non équivoque :

« L’autorité de police compétente peut toujours interdire, par arrêté pris sur le fondement de l’article L. 211-4 du code de la sécurité intérieure, une manifestation soumise à déclaration, dès lors qu’elle estime que la manifestation projetée est de nature à troubler l’ordre public, peu important que celle-ci ait fait ou non l’objet d’une telle déclaration ».

Autrement dit, que la manifestation soit déclarée ou pas déclarée, dès l’instant ou l’autorité de police l’a interdite… les participants sont sanctionnables sur le fondement de l’article L 211-4 du code de la sécurité intérieure. Qu’on se le dise.

 

Le deuxième exemple est tout aussi intéressant en ce qu’il concerne l’emploi des mots « qui vont bien » pour caractériser une infraction à la loi.

Comme je vous l’ai conté dans mes billets du 8 mars et du 7 avril dernier, certaines de nos « Z’élites » s’estiment plus égales que d’autres devant la loi. Certaines se sont retrouvées au restaurant pour festoyer entre amis du même camp, alors que le reste des citoyens est privé de restaurants et de réunions festives à plus de six personnes.

C’est le cas de « quelques collaborateurs » du ministère de l’enseignement supérieur qui, le 29 janvier dernier, aux alentours de vingt-deux heures, se sont octroyé un « moment de convivialité » !!! Ce moment a été filmé par une voisine du ministère et rapidement diffusé sur les réseaux « dits » sociaux, provoquant une indignation légitime de personnes respectant les mesures « dites » sanitaires.

Les réactions officielles sont savoureuses :

« C’était un vendredi soir, il était 22 h passé. Il s’agissait d’un moment de convivialité entre quelques collaborateurs, qui se trouvaient dans une cuisine partagée », explique le cabinet de la ministre à 20 Minutes, avant d’ajouter. « C’est un moment de détente en marge d’une semaine de travail, il n’y a pas lieu de monter ça en épingle.

« On bascule dans quelque chose de dangereux et nuisible, dans une société de délation avec des personnes qui filment aux fenêtres des collaborateurs de cabinet qui bossent 16 h/jour, 7 jours sur 7, observant la vie au quotidien d’un ministère et attendant le moindre faux pas », s’inquiète-t-on au cabinet de la ministre, qui évoque « une volonté de nuire au gouvernement ».

Infraction, moment de convivialité, amende, déclarée, monté en épingle, interdit … le choix des mots, je vous dis, le bon choix des bons mots. Tout est dans la nuance. Vive la novlangue. Surtout pas d’amalgames !!!

« L’absurde, c’est la raison lucide qui constate ses limites »

(Abert Camus)

Chers lecteurs, je vous aime et vous salue.

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

LETTRE D’INFORMATION


DERNIERS BILLETS MIS EN LIGNE


Certificats d’économie d’énergie : vous avez dit économie ?

Certificats d’économie d’énergie : vous avez dit économie ?

Le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE), créé en 2005 pour inciter à la maîtrise de la consommation énergétique, est dénoncé comme complexe, opaque et coûteux. La Cour des comptes juge ses résultats difficiles à mesurer et entachés d’un fort effet d’aubaine. Financé hors budget de l’État, son coût — environ 5,3 milliards d’euros par an — est répercuté sur les factures des ménages et des entreprises. Ce mécanisme ferait ainsi peser directement sur les consommateurs le financement de la politique énergétique.

Laizinjeccions : on peut débattre de tout, sauf des chiffres !

Laizinjeccions : on peut débattre de tout, sauf des chiffres !

Une étude de l’AIMSIB analysant les données officielles de 28 pays européens pour explorer les corrélations entre mortalité toutes causes confondues et injections anti-Covid. Les auteurs y affirment que les corrélations positives…

Banques et assurances françaises ? Tout va bien !

Banques et assurances françaises ? Tout va bien !

Le système bancaire français reste globalement solide fin 2024, malgré une légère hausse du risque de crédit, surtout pour les PME et la consommation. Les assureurs affichent une collecte en hausse et un marché en croissance, mais leur ratio de solvabilité recule et leurs placements, très majoritairement en valeurs mobilières, interrogent sur leur résilience réelle.

Le changement climatique n’est pas catastrophique. Si c’est Bill qui le dit !

Le changement climatique n’est pas catastrophique. Si c’est Bill qui le dit !

évolution des discours sur le changement climatique : certains dirigeants comme António Guterres appellent toujours à agir, tandis que d’autres figures – Ted Nordhaus, Bill Gates ou certains rapports scientifiques récents – nuancent ou revoient leurs positions sur l’impact du CO₂ et les scénarios catastrophistes. Le texte s’interroge enfin sur les enjeux économiques liés aux marchés du carbone et appelle à passer à l’action.

Énergie électrique : entre volonté politique et effets secondaires !

Énergie électrique : entre volonté politique et effets secondaires !

La transition électrique portée par des choix politiques dissimule des coûts réels : dépendance au lithium, extraction polluante, recyclage des batteries et enjeux géopolitiques. Le succès écologique affiché du véhicule électrique cache des externalités stratégiques et environnementales majeures.

SOCIAL