CE QUE L’ON VOIT :

Expressément visée dans le préambule de notre Constitution actuelle, datant du 27 octobre 1958, la déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen votée le 26 août 1789 est brève. En effet, elle comporte un préambule et seulement 17 articles exprimant sobrement les valeurs fortes nées de l’esprit de la révolution. Intéressons-nous aujourd’hui à son 17ème et dernier article, relatif au droit de propriété :

La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité.

Le « Code civil des Français », promulgué le 30 ventôse de l’an XII (21 mars 1804), est plus connu sous le nom de « code Napoléon ». Bien évidemment, il reprend l’esprit de la révolution, mais le choix des mots indique une certaine évolution dans la pensée des législateurs. Il définit le droit de propriété dans ses articles 544 et 545(rédaction inchangée depuis cette époque), qui sont ainsi rédigés :

Article 544

La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

Article 545

Nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité.

Rassurez-vous, chers lecteurs, il ne s’agit pas de développer ici d’une thèse de doctorat relative au droit de propriété, mais simplement de vous faire prendre conscience de « la réalité » qui se cache derrière les « grands principes » qui fondent notre société.

Pour résumer le sens profond de l’article 544, si sa première partie nous dit que l’on a le droit d’utiliser les choses « de la manière la plus absolue » sa deuxième partie soumet aussitôt ce droit à la règlementation qui n’est autre que l’interprétation, par les dirigeants politiques du moment, de « l’intérêt général ».

Autre limite de taille au droit de propriété, plus récente. La « naissance » en 1946, du droit au logement. Au fil du temps, ce droit c’est considérablement renforcé pour arriver à la Loi n°2007-290 du 5 mars 2007, dite « Loi DALO », autrement dit : la non-application de ce droit au logement est opposable à l’État.

Le propriétaire bailleur entrevoit déjà tous les « frottements » susceptibles de naitre de l’application de ces deux droits « opposables autant qu’opposés ».

CE QUE L’ON NE VOIT PAS :

Justement, en 2011, le Conseil Constitutionnel a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) pour ce qui concerne l’article 544 du Code civil. De façon sous-jacente était posée la question de sa primauté sur le droit au logement. Dans sa décision n° 2011-169 QPC du 30 septembre 2011, les sages réaffirment sa parfaite constitutionnalité….Pour combien, de temps ?

Dans un rapport de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale présenté le 16 février 2016, par son rapporteur Daniel GOLDBERG, figure la proposition d’inscrire le droit au logement dans notre constitution, au même niveau que le droit de propriété.

Autre « piège » du sentiment de la propriété immobilière. Vous avez déjà entendu parler du Time Share, autrement dit la multi propriété ? Piège, car il ne s’agit pas du tout de propriété.

Concept né de pratiques commerciales agressives, particulièrement mises en œuvre sur les côtes du sud de l’Espagne, aux, Baléares et aux Canaries, ce produit était (et est encore) présenté comme étant la copropriété d’un bien immeuble alors qu’il n’en est rien. En effet, c’est un simple droit de jouissance à temps partagé.

L’investisseur acquiert des parts de société, qui vont lui donner la possibilité de jouir périodiquement d’un bien immobilier situé généralement dans un endroit agréable pour les vacances. La destination des locaux n’est pas obligatoirement l’habitation de loisirs. On peut concevoir d’attribuer en jouissance à temps partagé des places de stationnement, des anneaux de ports, voire des locaux industriels. Afin de rendre ce produit plus attractif, les promoteurs proposent très souvent des possibilités d’échange (RCI). Hélas, un grand nombre de personnes pensant être propriétaires d’un « lieu de vacances idéales » se sont retrouvées démunies pour essayer de récupérer leur argent. La protection de notre code de la consommation n’est pas applicable, car les promoteurs relèvent d’un droit étranger.

Il faut bien comprendre que nous sommes face à des changements profonds de notre société. C’est la notion même de propriété qui évolue. En effet, nous passons d’un monde de propriétaires à un monde d’usagers. Plutôt que d’être propriétaire d’un bien dont j’ai besoin ponctuellement, pourquoi ne pas le louer uniquement quand j’en ai l’usage ? Cette question de bon sens au sujet d’une perceuse, d’un vélo, d’une voiture…se conjugue à beaucoup d’autres biens et services. Être propriétaire d’un bien relève déjà de la « vieille économie ». Louer, échanger, troquer, partager…sont aujourd’hui des attitudes de plus en plus courantes. Il suffit de voir l’essor des sociétés comme Blablacar (co voiturage organisé), de Airbnb(location de logement), de Mutum (prêt/emprunt d’objets), Zilok (locations entre particulier et pro), Ouicar (location de voiture) et même, « l’échange de maison » avec Guesttoguest, pour constater l’ampleur du phénomène.

Plus inattendu et beaucoup moins connu, MICHELIN, notre manufacturier leader du pneumatique en Europe n’a pas attendu « le miracle Internet » pour poser différemment la question de son développement. Cette société innove en 2008, avec le concept « Michelin Fleet Solutions ». Notre Bibendum national ne vend plus des pneumatiques à ses clients professionnels gestionnaires de flottes, il les loue. Les pneus restent la propriété de Michelin et le client est facturé aux kilomètres parcourus.

ET POUR MOI, ÇA CHANGE QUOI ? :

Vous avez déjà entendu et entendrez encore longtemps le « chant des sirènes » des vendeurs d’immobilier de défiscalisation. Vous savez, « cet investissement qui permet de vous enrichir grâce à vos impôts ». C’est à ce moment-là qu’il faudra se souvenir de ce billet. OUI, il faut « sortir » son patrimoine des produits bancaires et d’assurance-vie pour l’orienter dans des biens réels, tels que l’immobilier de rapport. Il ne faut pas pour autant « faire n’importe quoi » sous prétexte que l’on paye « trop d’impôt ».

Même pour un « investissement immobilier locatif simple », il est nécessaire de prendre du recul, de ne pas oublier de faire appel à son bon sens, éventuellement d’avoir recours à un conseil extérieur « non impliqué » dans le produit proposé. Ce sont des réflexes à acquérir et à développer pour éviter des déconvenues pouvant mener à la perte totale des sommes investies.

Sur un autre plan, il est maintenant nécessaire d’intégrer dans ses réflexions, l’émergence de nos nouveaux modes de consommation. La montée en puissance de «l’économie de partage » va remettre en cause des « stratégies établies ». Votre réflexion doit être la plus large possible. Cette évolution d’une société de propriétaires vers une société d’usagers nous amène à envisager différemment les stratégies de transmission. L’usager d’un bien n’a « plus rien » à transmettre !!!

Maintenant plus que jamais, le recours à un « véritable conseil » va s’avérer décisif. Gardez à l’esprit cette approche d’anticipation, quand un « conseil en gestion de patrimoine » vous proposera « le meilleur produit du moment».

Le principal aspect que je veux retenir de cette évolution de la société est la notion de partage. Cette transition vers le « monde de demain » dont je vous parle si souvent est en marche. Si aujourd’hui on passe par un intermédiaire pour s’échanger et partager, je suis totalement convaincu que demain, nous « parlerons directement à notre voisin » pour lui demander ou lui proposer un bien ou un service…..Comme le faisaient nos anciens. Il ne s’agit pas là de nostalgie, mais du plaisir de constater le retour des valeurs humaines d’amour et de respect des choses et des personnes.

Internet est un prodigieux outil de communication et d’échanges, mais mes « amis twitter » ne sont pas près de remplacer « mes potes de chaires et d’os » avec qui je partage une partie de boule lors d’une fin de semaine à la campagne. Quel bel objectif, de « transformer » une partie de mes « amis Tweeter » en « potes de chaires et d’os ».

Ce que voit Alex Andrin

Le pouvoir de changer les choses est à nous.
Pour ce faire, soyons curieux et obstinés.
Posons des questions. Rien ne doit rester tabou.
C’est en restant passif que nous serons ruinés.
Tant de nos certitudes se sont envolées,
Qu’il est temps d’arrêter d’être manipulé.
Gardez confiance, je vous aime et vous salue.