À QUELLE SAUCE FISCALE ALLONS-NOUS ÊTRE MANGÉS ?
C’est le 25 de ce pluvieux mois de septembre 2024, que la Cour des comptes a publié et communiqué à la commission des finances de l’Assemblée nationale, un rapport intitulé « Les droits de succession ».
Il tombe fort opportunément, en cette période où l’État a besoin de beaucoup, de beaucoup plus, d’énormément de sous de nos sous !
Ses quatre-vingt-douze pages sont une véritable boulle de billard qui risque de chambouler le jeu de quilles de notre fiscalité actuelle, ainsi que nos patrimoines.
Le ton est donné :
- Dans un contexte de finances publiques qui interdit toute baisse d’impôt non financée par des économies en dépense, la Cour des comptes estime qu’il est possible de mener une réforme des droits de succession à rendement constant en poursuivant simultanément la réduction des avantages fiscaux dérogatoires et une baisse ciblée des taux d’imposition».
Le rapport constate qu’au niveau des trente-huit pays de l’OCDE, nous sommes les champions du poids de la fiscalité des donations et des successions (16,6 milliards d’euros en 2023). Ils représentent 0,74 % de notre produit intérieur brut.
Malgré cela, la cour considère que ces (très bons) résultats sont « fortement réduits par des dispositifs dont l’impact sur les finances publiques est mal connu ». Elle pointe :
- Le dispositif dit « pacte Dutreil » qui permet une diminution de droits de donation ou de succession, pour les transmissions de parts ou d’actions de certaines sociétés.
- Le régime fiscal des capitaux d’assurance-vie versés au décès de l’assuré… qui est plus favorable que le droit commun.
- Le mécanisme du démembrement de propriété, qui permet une modalité de calcul de l’impôt très favorable.
Étant donné que la taxation des donations et successions est « un impôt mal accepté », la Cour : « estime qu’une réforme des droits de succession, si elle devait intervenir, devrait nécessairement se faire à produit constant ».
En conséquence, elle préconise : « l’élargissement de l’assiette de l’impôt à travers la réduction des avantages fiscaux attachés au « Pacte Dutreil » et à l’assurance-vie, d’une part, et une réduction ciblée des taux d’imposition d’autre part, en faveur notamment des collatéraux ou des enfants du conjoint, destinée à mieux prendre en compte les évolutions familiales et sociétales ».
Essayons de traduire toutes ces bonnes intentions en réformes qui devraient nous impacter.
L’assurance-vie :
La Cour considère que « D’un point de vue budgétaire, l’objectif assigné à la fiscalité de l’assurance-vie »… n’est plus au rendez-vous ! Les « nouveaux produits, contrats vie-génération et eurocroissance, créés en 2014 »… ont peu de succès : « leur collecte demeure, en l’absence de remise en cause du régime fiscal de l’assurance-vie « traditionnelle », relativement modeste » ! J’en conclus que l’assurance-vie va être impactée par une nouvelle fiscalité. Cela renforce mon opinion, s’il en était besoin, qu’il est judicieux de fuir ce produit.
Le démembrement de propriété :
Le démembrement est une technique civile qui a des incidences fiscales, très intéressantes. Les abonnés aux « Rendez-vous d’Hubert » ont déjà bénéficié de la connaissance des avantages de l’une d’elles : le démembrement croisé des parts de SCI. La Cour relève que le conseil d’analyse économique (CAE), ne trouve pas de « justification économique forte », au démembrement de propriété. Il se pourrait bien que le barème fiscal défini à l’article 669 du code général des impôts soit modifié. Raison de plus pour profiter maintenant de ce dispositif.
Le pacte Dutreil :
La Cour considère que « L’absence de données précises sur les entreprises bénéficiant du pacte Dutreil et sur les modalités de mise en œuvre de ce dispositif empêche de tirer des conclusions robustes sur sa pertinence économique, et sur les usages qui en sont faits ». Mais, le CAE « propose, notamment, de mettre fin aux exonérations offertes par la souscription des pactes Dutreil, ou, à tout le moins, d’en réduire la portée ». J’en conclus que ce dispositif devrait subir des modifications. Il est judicieux de l’employer, rapidement, à chaque fois que c’est possible.
Certains s’en réjouiront, d’autres pas… les rapports de la Cour des comptes ne sont qu’informatifs. Les recommandations des « sages de la rue Cambon » n’ont pas de caractère contraignant.
Le dernier rapport du « suivit des recommandations des juridictions financières », en date du 21 juin 2023, est éloquent. Pour l’année 2022, moins du quart des recommandations (23%) sont totalement mises en œuvre. Pire, 34% des recommandations ne sont pas du tout suivis d’effet !
La cour déplore que : « La tendance sur quatre ans est une baisse sensible de la part des recommandations complètement ou partiellement mises en œuvre, celles des recommandations non mises en œuvre étant passées de 20 % en 2018 à 34 % en 2022 ».
Reste à savoir ce que nos députés vont faire de ces recommandations de la Cour des comptes… compte tenu de la mascarade qu’ils nous ont offerte, depuis quelques semaines.
Nous ne sommes plus dans le rationnel. Hélas, tout est possible !
« Le langage politique est destiné à rendre vraisemblable les mensonges,
respectables les meurtres
et à donner l’apparence de la solidité à ce qui n’est que vent »
(George Orwell)
Chers lecteurs, je vous aime et vous salue.
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