La Légion d’honneur est, depuis son institution par le premier consul Napoléon Bonaparte, le 29 floréal an X (19 mai 1802), la plus haute et la plus ancienne distinction honorifique française attribuée aujourd’hui. Elle récompense le mérite individuel sous toutes ses formes, au service de la défense, mais aussi du développement et du rayonnement de la France.

Le futur empereur avait parfaitement compris l’intérêt symbolique d’unifier et remplacer les différentes anciennes décorations et distinctions de l’époque. Son grand principe fondateur : La reconnaissance nationale du mérite individuel. Autres grandes caractéristiques de cette nouvelle institution :

  • Substituer la reconnaissance du mérite personnel aux privilèges de la naissance, qui était en vigueur avant la révolution.
  • Ouvrir l’accès à cette haute distinction, aussi bien aux militaires pour leur courage, qu’aux personnes issues de la société civile pour leur talent.

Depuis son origine jusqu’au Second Empire, les promus étaient essentiellement des militaires (environ 75%). La révolution industrielle permet d’ouvrir plus largement son accès aux milieux industriels. Les deux guerres mondiales et les opérations militaires en Indochine et en Algérie provoquent une sensible augmentation des promus (320 000 en 1962).

Le général de Gaulle, pour renforcer le prestige de cette distinction, réforme le système des décorations nationales en édictant le code de la Légion d’honneur et de la Médaille militaire qui limite à 125 000 personnes vivantes, le nombre de distingués.

Dans une lettre du 11 juillet 2008, le président de la République, Nicolas SARKOZY, indique à son Premier ministre, François FILLON, qu’il a décidé de faire encore évoluer cette institution et lui demande, dans ce cadre : « d’assurer des chances égales entre hommes et femmes »… de « porter la plus grande attention aux personnes d’origine modeste »….et enfin, « de reconnaitre et de récompenser les mérites des bénévoles ». C’est chose traduite par celui-ci dans la circulaire du 24 septembre 2008.

L’article R6 du code  de la Légion d’honneur et de la Médaille militaire précise que l’ordre est composé de chevaliers, d’officiers, de commandeurs, de grands officiers et de grands-croix. Le grand chancelier est choisi parmi les grands-croix par le président de la République, lui-même grand maître de l’ordre. Cette dignité est conférée de plein droit à chaque nouveau président, lors de son investiture.

Pour ceux d’entre vous, chers lecteurs, qui voudraient aller plus avant dans la passionnante étude des ordres et décorations, autrement dit la phaléristique, véritable science auxiliaire de l’histoire, au même titre que l’héraldique, la généalogie, la vexillologie…., allez « naviguer » sur  ce site d’un passionné, ou bien, visitez celui-là. Allez, un petit dernier, pour la route J J J. Ne me remerciez pas, c’est avec grand plaisir que je vous fais partager les informations que j’ai découvert en préparant ce billet à votre intention.

Ce principe d’universalité de la reconnaissance nationale entre hommes et femmes et surtout entre militaires et civils est parfois à l’origine d’une incompréhension,  voire d’intolérance, de la part de certains. Telle celle de la remise de la médaille de chevalier de la Légion d’honneur le 4 mai 2015 à Mimie MATHY, par son amie Line RENAUD.

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Pourquoi cette intolérance ? Sentiment d’injustice ?

Lors « d’une autre vie », dans ma carrière militaire de pompier de Paris, j’ai eu l’occasion de vivre des situations « amusantes ».

Un officier qui, lors d’une explosion sur une intervention pour feu dans une cartoucherie, n’est pas accouru pour sauver des camarades blessés, mais a couru….pour s’éloigner du lieu où sa présence était pourtant nécessaire (il court encore….peut-être l’avez-vous récemment vu courir ?) et qui a été décoré pour « acte de courage et de dévouement ». Il est vrai qu’il a participé au rapport officiel de l’intervention.

Un sous-officier est en instance de punition, pour être resté « trop longtemps » en intervention sans donner de ses nouvelles au commandement. Ce manquement à la discipline lui a permis de participer très activement au dégagement de deux personnes vivantes des décombres, lors du déraillement de deux trains dans un tunnel. Punition abandonnée pour cause de proposition de décoration pour « acte de courage et de dévouement », faite par un parlementaire présent sur les lieux de l’intervention.

Pour ce qui est de l’incompréhension de certaines attributions de ces décorations, il est vrai que des situations prêtent à questionnement :

  • Le 5 juin 2015, Monsieur Akbar al-Baker, PDG de la compagnie Qatar Airways, est élevé au rang d’officier de la Légion d’honneur par François HOLLANDE lui-même, lors d’une cérémonie « très privée », car selon Le Point,  même pas mentionnée dans l’agenda présidentiel. Il est vrai que cette compagnie a acheté « quelques » AIRBUS (très exactement 37exemplaires du modèle A350-1000).
  • En août 2016, une « fuite » nous apprend que sur proposition de Jean-Marc AYRAULT, notre ministre des affaires étrangères, Monsieur Lionel BARBER, rédacteur en chef du Financial Times sera fait chevalier de la légion d’honneur en reconnaissance de « son rôle positif dans le débat européen ». Pour rappel, ce journaliste s’est illustré dans son journal, comme un farouche opposant au Brexit.
  • La presse saoudienne nous révèle que le prince héritier Mohammed bin Nayef bin Abdelaziz Al Saoud a été élevé au rang de grand officier de la Légion d’honneur par notre président de la République, lors de sa visite à Paris du 4 mars 2016. Pour quelles raisons ? Peut-être le « principe de réciprocité ». En effet, notre président est décoré de « l’ordre suprême du Royaume » en Arabie Saoudite. Je n’ose croire que c’est en remerciement des nombreux contrats d’achat d’armes signés par cette « monarchie pacifique ».
  • Thomas DUTRONC déclare, peu après avoir reçu la Légion d’honneur : « Avant, on la décernait à des gens qui risquaient leur vie, des héros. Maintenant, on la donne à tout le monde, c’est du copinage ».
  • Un autre Thomas….PIKETTY, économiste à succès, notamment avec son ouvrage « Le capital au XXIème siècle », qui refuse sa nomination dans l’ordre de la Légion d’honneur en ces termes « Je viens d’apprendre que j’étais proposé pour la Légion d’honneur. Je refuse cette nomination, car je ne pense pas que ce soit le rôle d’un gouvernement de décider qui est honorable» et d’ajouter « Ils feraient bien de se consacrer à la relance de la croissance en France et en Europe ».
  • Le 25 octobre dernier, Manuel VALLS a élevé son ami, Alain BAUER, ancien conseiller sécurité de Nicolas SARKOZY, titulaire de la chaire de criminologie du conservatoire des arts et métiers (CNAM), au rang de commandeur de l’ordre de la Légion d’honneur, alors que celui-ci…..Fais l’objet d’investigations policières, dans le cadre d’une enquête préliminaire relative à des contrats de complaisance avec la CDC.
  • Il est vrai que Jacques CHIRAC est toujours grand-croix de la Légion d’honneur, malgré une condamnation définitive le 15 décembre 2011 à deux ans de prison avec sursis pour détournement de fonds publics, abus de confiance, prise illégale d’intérêts et délit d’ingérence.

Ces décorations et médailles sont « le fait du prince » et quoi qu’il s’en dise « en haut lieu », tout cela n’est qu’une pantalonnade ……mais nous en raffffôôôôlons, nous autres français.

Gardons cependant à l’esprit qu’en parfaite lucidité et en grand stratège qu’il était, Napoléon Bonaparte, lorsqu’il créa l’ordre de la Légion d’honneur en 1802, déclarait : « Les titres et les décorations sont les hochets avec lesquels je mène mes maréchaux et mes généraux, en faisant ce que j’en veux ».

Pour un peu plus « brouiller les cartes », figurez-vous que François HOLLANDE, après avoir envisagé sérieusement, l’attribution de la Légion d’honneur aux victimes des attentats meurtriers de novembre 2015, a finalement signé le 12 juillet 2016, le décret n° 2016-949 « portant création de la médaille nationale de reconnaissance aux victimes du terrorisme ». Cette médaille  est la 5ème dans le rang protocolaire, juste après l’ordre national du mérite et avant la croix de guerre et la valeur militaire !!!

C’est tout de même curieux, non ? Une médaille pour….avoir été assassiné par de lâches personnes fanatisées !!! C’est une véritable insulte pour ces morts et pour leur famille que cette récupération politicienne. De plus c’est un amalgame (mot trézalamôôôde) particulièrement déplacé avec l’institution de la Légion d’honneur.

Je pense qu’il est beaucoup plus important de pratiquer, chacun dans sa vie et à sa place, sans aucune demande de reconnaissance, simplement pour « être vrai envers soi-même », l’amour du travail bien fait, l’altruisme et la préoccupation du bien des autres. Si en plus grand nombre, nous développons ces vertus que nous avons tous en nous, le rayonnement de la France sera plus éclatant que la médaille de la Légion d’honneur.

Chers lecteurs, je vous aime et vous salue.