Ce que l’on voit :

Si la « nationale 7 » a été immortalisée par Charles TRENET, la nationale 10, devenue depuis peu l’A63, entre Bordeaux et l’Espagne, n’a pas eu ce privilège, mais elle le mériterait bien.

En effet, elle traverse cette magnifique forêt des landes de Gascogne « las lanas de Gasconha » en gascon.

 

Cocorico, notre belle forêt landaise est la plus grande forêt artificielle d’Europe de l’Ouest avec presque un million d’hectares. Hormis des chênes, elle est principalement constituée de pins maritimes qui ont la capacité de fixer le sable. Son bois est utilisé pour les charpentes, la menuiserie et la papeterie. Hélas, cette belle forêt a récemment fait la une de l’actualité avec un feu qui a ravagé plus de 160 hectares.

Jusqu’au dix-neuvième siècle, ce vaste territoire humide au sol sableux était peuplé d’éleveurs ovins. Si les échasses font aujourd’hui l’objet de spectacles de rues, c’était à l’époque le meilleur moyen pour les bergers de surveiller leur cheptel.

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La « loi relative à l’assainissement et à la mise en culture des Landes de Gascogne » du 19 juin 1857 met fin à ce mode de vie ancestral.

L’ancien système agropastoral permettait de nourrir les familles en tirant un maigre profit des terres de la lande. La nouvelle loi va pousser les populations à se recycler dans l’industrie du bois et du gemmage.

Certains ont assimilé la mise en œuvre de cette loi à une véritable « colonisation intérieure ». Il est vrai que son histoire est tout, sauf « un long fleuve tranquille ».

Quarante années d’enquêtes, d’essais en tous genres précèdent la loi. Les projets se succèdent, chacun des intéressés propose des suggestions, mais finalement, rien ou presque ne se fait.

Dès son élection en décembre 1845, voulant marquer son époque, le nouveau président de la deuxième république, le futur empereur, Louis-Napoléon Bonaparte, s’implique très fortement dans ce projet aussi simple sur le papier, que titanesque à réaliser : il faut évacuer l’eau qui stagne sur cette immense plaine, la rendant stérile et malsaine, puis remplacer la lande par une culture ou des forêts.

Il pense que la réalisation de ce chantier lui permettra non seulement de finir la fixation des dunes de sable du littoral de Gascogne, lancé par son oncle, l’empereur Napoléon Bonaparte, mais aussi de développer fortement l’économie de cette partie du pays.

Il nomme l’ingénieur des ponts et chaussées François Jules Hilaire Chambrelent pour superviser et coordonner les travaux. Celui-ci profite de l’expérience de son collègue Nicolas Brémontier, inspecteur général des ponts et chaussées.

Le projet, scientifiquement étudié, reste à le mettre en œuvre et surtout, à le faire accepter par la population locale. Et c’est là que l’habile homme politique qu’il est, se révèle d’une grande efficacité.

Plutôt que de mettre en œuvre son plan de façon centralisée « depuis Paris », il va s’appuyer sur le préfet. Il a retenu la leçon de son oncle. Le préfet, représentant du gouvernement, est bien implanté localement ou il a tissé des liens avec les notables. Il saura donc parfaitement influencer les maires qui pourront s’approprier ce grand projet.

Le préfet est rassurant ; « L’Empereur s’occupe d’un projet de loi pour assainir et mettre en valeur les Landes, mais que rien ne sera fait pour dépouiller les communes de leurs biens ». Il va donc inciter les maires à vendre les terrains de la commune à des propriétaires privés en échange de l’obligation de boiser selon un cahier des charges établi. Plus fort encore, pour emporter l’adhésion des édiles, il est prévu que les privatisations des parcelles communales se feront degré à gré, c’est-à-dire que les enchères se feront à des propriétaires locaux et sans le contrôle de l’état.

Les résultats ne se font pas attendre. Le mouvement est enclenché de façon durable et c’est la naissance de la forêt landaise que nous connaissons aujourd’hui. La forêt des landes de Gascogne actuelle représente 1 million d’hectares boisés, détenus à 90% par des propriétaires privés. 7800 propriétaires forestiers sont engagés dans la filière bois tant régionale que nationale (8 millions de m3 exploités par an). 77000 hectares sont classés en site natura 2000.

Ce que l’on ne voit pas :

Il ne fait aucun doute que Louis-Napoléon Bonaparte, à travers la réalisation de cet aménagement territorial majeur, avait des visées éminemment politiques. Cela étant, il a su, pour son bénéfice ultérieur, mettre en avant les autorités locales que sont les préfets et les maires.

Son habileté a consisté à « décentraliser le pouvoir », bien que ce terme ne fût pas de mise sous le règne de l’empereur Napoléon III. Cette histoire montre à quel point les choses se règlent souvent plus facilement lorsqu’elles sont traitées localement. Louis-Napoléon Bonaparte avait foi en son projet. Il a su utiliser au mieux les capacités de ses administrés.

Si nous parlons maintenant d’initiatives novatrices, il est évident qu’elles seront plus pertinentes si elles « viennent du terrain ». Qui est le mieux placé pour trouver la meilleure solution, que celui qui est confronté à une difficulté ? Nous sommes actuellement en pleine crise, non seulement financière, économique, mais aussi, identitaire, politique et sociale. Dire aujourd’hui « je ne peux rien faire à mon niveau », relève non seulement du manque de foi en soi, mais surtout d’une méconnaissance du grand principe universel selon lequel : notre vie n’est que ce que nous décidons d’en faire.

Il est plus que temps de quitter le pessimisme stérile pour nous engager résolument dans un réalisme constructif.

Ce que voit Alex Andrin

Le pouvoir de changer les choses est à nous.
Pour ce faire, soyons curieux et obstinés.
Posons des questions. Rien ne doit rester tabou.
C’est en restant passif que nous serons ruinés.
Tant de nos certitudes se sont envolées,
Qu’il est temps d’arrêter d’être manipulé.
Gardez confiance, je vous aime et vous salue.